mercredi 18 juin 2014

Nouveau livre de Kä Mana : Pour l'économie du bonheur partagé






Vient de paraître

Kä Mana, Pour l’économie du bonheur partagé : construire une société heureuse, Kinshasa, Editions du Cerdaf, 2014

Par Omer Tshiunza Mbiye
  
Dans Ce livre, on trouvera des réflexions consacrées à l’urgence de construire une société heureuse en République Démocratique du Congo et partout en Afrique, grâce à un humanisme planétaire du bonheur économique et social partagé. Il s’agit d’une démarche de ce que les philosophes appelleraient l’anthropologie économique : une certaine vision de l’homme et de la société comme communauté de destin confrontée aux impératifs de la prospérité matérielle et aux exigences des valeurs de vie pour assurer et garantir cette prospérité communautaire.
Le philosophe Kä Mana s’emploie à penser cette voie du bonheur économique partagé selon l’ordre de la liberté, de la responsabilité et de la créativité des citoyens, par le canal du développement et de la promotion de l’enrichissement de l’être humain dans ses ressources fondamentales et dans son pouvoir de plénitude de vie. C’est-à-dire l’énergie dans laquelle toute communauté qui veut grandir en humanité et prospérer en production des richesses pour tous doit investir la meilleure part de sa volonté et de son génie.
Pour le philosophe congolais, cette perspective de vision est principalement aujourd’hui un besoin de sortir résolument de l’ultracapitalisme, ce système dont la RDC est actuellement une proie facile, et l’Afrique, un irrésistible aimant. Pour penser et dérouler les impératifs de ce besoin d’une nouvelle société hors des carcans de l’ultralibéralisme, Kä Mana propose au grand public cultivé congolais une lecture riche et fortifiante du livre La cause humaine écrit par un important témoin de notre temps : le penseur français Patrick Viveret. Ce livre est à la fois un hymne à l’avenir et un cri de confiance en la capacité créatrice de l’homme. Nous pensons que sa substance intéresse au plus haut point les préoccupations de l’homme congolais et les utopies de l’Afrique entière, surtout quand il s’agit, comme aujourd’hui, de refonder l’économie sur les valeurs de l’humain pour l’ensemble de l’humanité.
L’auteur propose en même temps une lecture africaine d’un autre grand livre européen : L’économie du bien et du mal, écrit par le penseur tchèque Tomas Sedlacek. Il s’agit d’un ouvrage magistral dont l’ambition est de rechercher « l’esprit de l’économie » en visitant toute l’histoire des visions économiques depuis les mythes les plus anciens de l’humanité jusqu’à notre époque actuelle. Une fois mis en relief ce que l’économiste tchèque a vu et défini, le philosophe congolais a voulu savoir ce que l’Afrique peut offrir comme fondements anthropologiques à l’économie dont le monde a besoin maintenant, dans le contexte de crise globale d’un système de moins en moins capable de guider « l’esprit économique » de manière claire et fertile.
Sur la même lancée, il analyse d’un point de vue africain un autre livre d’un grand témoin de notre temps, l’économiste australien John Quiggin, une grande intelligence iconoclaste dont notre pays et notre continent gagneraient à écouter la voix de sagesse et d’espoir. Significativement intitulé Economie zombie, ce livre présente, scrute et démystifie les idées fausses qui, au cœur du libéralisme de marché, ruinent les possibilités et les promesses d’une nouvelle orientation économique pour l’humanité.
Pousuivant son investigation, Kä Mana se penche sur un quatrième livre : Histoire de la modernité, de Jacques Attali, l’un des esprits les plus éclairés et les plus lucides dans l’Occident actuel. Sa pensée conduit le philosophe congolais à construire une nouvelle conscience africaine face aux défis auxquels les sociétés contemporaines sont confrontées, surtout celui d’inventer une civilisation de l’altruisme et une culture de la convivialité à l’échelle planétaire.
 Enfin, l’auteur s’attache à mettre en lumière le message de ceux qu’il appelle les prophètes du sens économique. Parmi ceux-ci, un témoin de taille : le moine bouddhiste français Matthieu Ricard. Il est invoqué pour la force de son anthropologie et de ses enjeux éducatifs pour une économie du bonheur partagé. Kä Mana invoque en même temps les dynamiques de l’économie sociale et solidaire, chemin vers une nouvelle vision de la prospérité matérielle et de la vraie richesse humaine. A ceux-là sont reliées les associations d’action politique et culturelle qui sont aussi les lieux d’une nouvelle perception du sens économique.
 Ces cinq premiers chapitres achevés, le philosophe congolais reprend un texte prémonitoire sur l’éthique et l’économie, une conférence qu’il avait présentée à un colloque organisée par l’Ecole des Hautes Etudes de Montréal, au milieu des années 1980.  Les problèmes de l’ultralibéralisme qui se posent aujourd’hui avec acuité y sont déjà perçus avec force et lucidité.
A partir de la relecture de cette conférence et de l’analyse des enjeux humains mis en lumière par les grands témoins de notre temps, l’auteur se tourne vers les enjeux congolais de toutes les réflexions déployées dans le présent livre. Il les prend comme socle pour penser les questions concrètes de la nation congolaise aujourd’hui. Principalement : l’exigence de cohésion nationale dans une éthique de la reconstruction de l’imaginaire congolais pour le bonheur partagé. Nous savons que les temps sont favorables pour la promotion d’une telle éthique et l’auteur en définit les conditions pour réussir cette nouvelle orientation de notre destinée nationale.
Cela le conduit à se concentrer sur l’économie congolaise comme enjeu de puissance, autour de la question de la monnaie et de sa signification anthropologique. Cette question est capitale et la manière dont les responsables économiques et financiers de notre nation y répondent déterminera ce que le génie humain congolais pourra être dans l’avenir : une force de grandeur et de rayonnement ou un poids d’impuissance chronique et de déchéance endémique.
Au cœur des préoccupations ainsi mises en lumière, c’est de l’homme congolais qu’il s’agit : de sa solidité intérieure, de la fécondité de son imaginaire, de sa capacité à s’inventer un grand avenir et de l’énergie qu’il veut assumer par la foi en ses propres dynamiques de destinée en Afrique et dans le monde. Comment doit-il aujourd’hui développer les capacités créatrices qui constituent son capital le plus riche ? Quelles sont les voies qu’il doit  ouvrir et les moyens qu’il doit inventer pour construire le présent et le futur du pays ?
La réponse à ces questions est dans une dynamique éducative solide. L’auteur s’y consacre en mettant en lumière les pathologies dont souffre la société congolaise en matière de leadership et du développement humain. Il ouvre en même temps les horizons pour remédier à cette crise de l’homme et de la société aujourd’hui, grâce à une vision du changement dans les principes éducatifs.
 De cette réflexion, nous partageons la substance et le sens. Nous sommes sensible non seulement à la manière dont l’auteur s’inscrit dans les grands enjeux économiques du monde contemporain, mais surtout à la force avec laquelle il éclaire ces enjeux du point de vue de l’éthique africaine.  Dans ce livre, l’Afrique parle dans son histoire et dans ses valeurs de civilisation qui sont définies comme valeurs d’avenir, dans un humanisme du bonheur partagé : chemin, clé et secret pour la construction et l’avènement d’une société heureuse.
         Au moment où le Congo cherche péniblement une vision fertile pour ouvrir une voie économique nouvelle et contribuer à l’émergence d’un autre monde possible, le présent livre d’anthropologie économique et de philosophie pour une nouvelle économie arrive à point nommé. Il aidera à nourrir les débats congolais et africains sur une éthique économique mondiale et sur le rêve d’un autre monde possible. Un monde dont l’Afrique serait la route de vie et la force d’invention.                        
Omer Tshiunza Mbiye
Président du Club pour l’Eveil du Congo


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